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[Batonnoir]

Satu Mare

 

 

Des champs à perte de vue. Des paysans en train de labourer la terre afin d'y semer le radis, semence d'hiver. La plupart d'entre eux étaient libres, quoiqu'il subsistât quelques esclaves. La famille de Satu Mare n'avait jamais complètement renoncé à leur emploi, c'eût été une faute politique provoquant l'ire des grands propriétaires terriens.

 

Car plus que jamais, la famille ducale cherchait l'unité en son domaine. Gorgon, jeune commandant de la garde de la cité, ressentait un stress quasi quotidien. Car l'officier n'a pas les mêmes contraintes que l'exécutant. Les ordres ducaux et ceux du général se télescopant, comme une surenchère perpétuelle, Gorgon finissait ses journées vidé.

 

Dans son casernement, une bougie était posée sur la table basse. Sa loge était rudimentaire, pour un commandant. Car si le duc était richissime, l'argent avait été consacré aux choses militaires depuis quelques années. Avant de s'endormir, il tint à relire une dernière fois l'ordre reçut tard dans la soirée, de peur d'avoir mal interprété ce qui y était écrit.

 

Commandant Gorgon,

 

Votre mission précédente prend fin. Une quantité suffisante de greniers a été installée entre Satu Mare et Bolgar.  Son altesse exige que je fasse lever une armée depuis le duché afin de l'envoyer en soutien de la Kataphractos I qui est sur place.

 

Vous êtes tout désigné dans cette tâche. Je tenais à vous le dire par écrit bien qu'à l'heure où vous lisez ce parchemin, le duc vous aura avisé en personne de votre mission.
 Vous disposez de deux mois pour rassembler une soldatesque d'importance et d'un mois supplémentaire pour leur apprendre le maniement des armes... en accéléré.

 

Ne perdez pas de temps. La route est longue jusqu'à Bolgar, environ 1250 lieues et d'après les renseignements que l'on a sur place, nous ne tarderons pas à les voir débarquer dans le khanat.

 

Le duc va relâcher un peu la pression sur la frontière polo-provençale. Notre mission ici est capitale. Si Bolgor tombe, rien ne pourra les arrêter.

 

Gorzakis, Général

 

 

 

C'était bien au Printemps donc que l'armée de renfort devrait décoller. Gorgon pensa tout de suite que passer par Kassa serait une bonne idée. Cette ville disposait de nombreuses tavernes et bordels, autant de lieux de recrutements...forcés.

 

 

[Batonnoir]

Sur la route de Bolgor, Printemps, date inconnue.

 

 

 

L'armée du duché de Transcarpathie faisait route vers Bolgor depuis maintenant 24 jours. Le rythme était soutenu: l'armée parcourait environ 25 lieues par jour. Les ordres de Gorgon reçus cet hiver avaient été clairs: il fallait arriver le plus vite possible.

 

L'armée qu'il avait eu le temps de rassembler était en demi-teinte. D'une part, il disposait d'un contingent de chevaliers lourds venus tout droit de Kassa. Le reste, hélas, n'était que piétaille rapidement formée sur le tas. Trois mois en tout et pour tout pour en tirer quelque chose. Insuffisant. Il ne manquait pas que de l'expérience, de dextérité, c'était aussi du moral. Car les hommes comprenaient mal qu'on les réquisitionne pour partir en guerre dans une contrée si lointaine qu'il faudrait 40 jours à cheval pour y arriver.

 

Et pourtant l'enjeu était de taille.

 

Bolgor était un duché indépendant, dont la capitale, Bolgor, possédait des murailles à tours de flanquement. Depuis voilà 1 an, les Mongols de la Horde d'Or avaient fait razzia sur la contrée et avaient disposé un siège autour de la capitale. Si la ville tombait entre leurs mains, ils ne tarderaient pas à toquer aux portes de la transcarpathie dans les mois à venir...