Au fil des mois le ventre de Colasse s’était joliment arrondi et de même sa santé s’arrangea, les nausées cessèrent mais la fatigue devenait de plus en plus importante. L’espoir d’un fils avait apaisé le caractère querelleur de Fragan, il avait d’ailleurs fait déménager son épouse dans ses propres appartements le temps de la grossesse afin d’avoir un œil sur elle à chaque instant. Plus que sa femme, c’était surtout envers le futur héritier que le Duc portait attention et cela devait passer par le bien être de la Duchesse tel que l’avait signifié la vieille femme. Bien que ses terres l’eussent retenu souvent et durant de longues journées à l’extérieur, lorsqu’il était au château, c’était à sa table de travail qu’il se devait. Ainsi, il avait fait aménager dans l’antichambre une méridienne confortable sur laquelle la Duchesse pouvait s’atteler à sa couture en compagnie de sa petite cour.
Traité après traité, Fragan s’était satisfait de la tournure que prenait la Maison de Galles et reprenait espoir quant à la pérennité de sa lignée bien que non directe. Cependant, des malheurs s’étaient abattus sur un nombre important de nouveaux nés, ce qui l’avait à nouveau inquiété. Alors que des doutes commençaient imperceptiblement à s’éveiller en lui sur le naturel des évènements, l’annonce de la grossesse de Colasse le détourna complètement de ces réflexions. Dorénavant, il concentrait son attention sur les jeunes enfants Wales. Fille ou garçon, lien directe ou non, La Maison de Galles avait risqué de disparaitre. Aussi Fragan voulait s’assurer qu’il y aurait toujours une descendance d’assurée et que son nom perdurerait dans le temps en quantité et en qualité. Ainsi, après avoir conclu unions sur unions, il prenait contact maintenant avec ses voisins afin d’obtenir une excellente éducation aux enfants Wales.
Depuis le mariage conclu avec la famille Ayr, Fragan avait d’ailleurs gardé un contact cordial avec la Duchesse De Swansea et il était entendu de tous que cette dernière était une référence concernant l’art courtois des bonnes manières. Ce qui devenait une science pour toute les jeunes filles de Grande Maison souhaitant un jour s’élever auprès de la cour du Roi ou tout simplement offrir à sa famille l’honneur d’un nom prestigieux dans leur généalogie. Aussi, il y avait la fille de Philibert qui venait de fêter ses quatre ans et qui semblait avoir hérité d’une parfaite santé. Elle était encore bien jeune, mais il n’était pas trop tôt pour lui assurer une place auprès de la Duchesse de Swansea lorsqu’elle serait en âge de faire ses classes. Fragan considérait que sa propre femme serait bien assez occupée avec leur fils pour s’occuper de la progéniture du reste de la famille. Et les membres imminents de la Famille Wales se faisaient de plus en plus vieux. La maisonnée perdait peu à peu ses représentants prestigieux, il fallait y remédier !
Il se trouvait à son bureau justement pour écrire à la Dame qu’il tenait pour être l’une des plus belles de sa génération. En effet, il se rappela l’avoir entraperçu il y a de cela des années à la cour. Ils étaient encore tout jeunes l’un et l’autre et la jeune fille qu’elle était à l’époque attirait déjà bien des regards. Fragan avait ouïe dire que la femme qu’elle était devenue ne manquait en rien de charme et que sa fraiche beauté était devenue une séduisante rose qui ne manquait point de piquant. C’est donc en ces termes avec un petit sourire en coin qu’il écrivit :
« Nous, Fragan Of Wales, Duc de Galles.
À l'attention de Sa Grâce, la Duchesse de Swansea, à sa Très Généreuse Dame Sklaera d'Ayr.
Je vous salue, ma Dame, en ce jour ou nous nous rappelons de l'honneur que vous nous avez fait en acceptant l'union de nos deux familles par le mariage et vous remercions à nouveau pour cette démarche qui nous a permis de sauvegarder notre nom.
Je vous écris ce jour car j'aurais à nouveau une requête à faire auprès de vous, je fais appel à votre bonté qui n'a d'égal que vostre beauté.
En effet, nous avons en nostre sein une enfants déjà belle et d'une santé parfaite dont le statut d'héritière potentielle, dans le cas où ma descendance ne recevrait point la bénédiction de nostre Divin Seigneur, mande à ce que son éducation soit étroitement prise en main.
Vous n'êste certainement pas ignorante de la qualité qui vous est faite concernant l'Art de la Courtoisie dans nostre beau et paisible Royaume. Qualité qui n'est point guère la seule à vous être reconnue mais il s'agirait ici de comprendre que nulle autre que vous ne pourrait s’acquitter d'une tâche aussi sérieuse que l'éducation d'une jeune demoiselle.
Lorsqu'elle atteindra l'âge requis de cinq ans, âge suffisamment mur pour quitter la protection de ses parents, je me permettrai de vous la conduire moi-même afin que vous puissiez voir en elle toutes les qualités que je vous ai énoncées.
J'aurai ainsi le plaisir de pouvoir baiser votre gracieuse main et d'échanger plus amplement avec vous sur ce que je pourrai vous offrir en échange de cette précieuse requête.
Veuillez premièrement accepter le cadeau qui accompagne cette missive et qui je suis certain, sera d'un plus bel effet à vostre cou.
Vostre respectueux et irrévocablement dévoué débiteur,
Fragan of Wales, Duc de Galles »
C'est ainsi que le Duc envoya son courrier avec lequel se trouvait un fabuleux collier de perles rehaussé d'un saphir de taille.
